Sep 4, 2010

Un train-train quotidien

Milieu de la nuit. Je me réveille en sursaut. Le sol vibre et un bruit infernal approche. Dans la tente, les trois autres dorment. Quelques secondes, le temps que mon esprit se dégourdisse. Je réalise alors qu'il s'agit d'un des trains qui traversent la forêt, là, à quelques mètres de notre campement.

Depuis plus d'une semaine qu'on pagaie sur le lac Baïkal et presque autant de temps qu'on plante notre tente à une vingtaine de mètres de la voie ferrée. Pas vraiment le choix: le Transsibérien longe la rive est du lac, le chemin exact que nous pagayons. Des trains de marchandises et de passagers s'y succèdent à une quinzaine de minutes d'intervalle. Et ils ne chôment pas la nuit, je vous assure.

Dur retour à la réalité pour un quatuor qui a écouté pendant plusieurs semaines le silence des plaines mongoles. Depuis Oulan-Oude, les signes de présence humaine se multiplient: chalets, cabanes de pêcheurs, villes et villages. Le train n'est que le plus bruyants et plus visibles de ceux-ci.

Ce n'est pas un sujet de discussion, mais on sait que Baïkal est la dernière étape du périple. Tous, silencieusement, on tente de faire abstraction des bruits environnants pour profiter des beautés de cette mer d'eau douce. Et les beautés sont nombreuses. Des montagnes garnies de conifères qui plongent dans les abysses du plus profond lac du monde (jusqu'à 1,6 km à certains endroits). Des rivières claires qui s'ajoutent à une étendue contenant 20% de l'eau douce de la planète, l'équivalent des Grands Lacs canadiens réunis.

Mais mon coup de coeur reste ce petit lagon d'une dizaine de kilomètres qui nous a accueillis à la sortie du delta de la Selenge. Dès qu'on s'est mis à le longer, Sarah m'a lancé toute souriante: «Il ne manque que le goût salé de l'eau et on est aux Îles-de-la-Madelaine.» Elle avait raison. De minces bancs de sable séparent la rive de l'eau turbulente du large. Un pas de plus nous rappelant que le retour approche... 

Par Ulysse Bergeron

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